DAMIEN HIRST / AUDREY NERVI / AXEL PAHLAVI : CHAIR PEINTRE....

Et si Damien Hirst était en passe de s’imposer définitivement comme un artiste majeur du XXIe siècle ? Après son coup d’éclat de la vente Sotheby’s de l’année dernière qui montre une franche maîtrise du fonctionnement du marché, sa récente exposition à la White Cube de Londres confirme sa capacité à se renouveler, imposer son œuvre, surprendre et faire parler, bouleverser les normes et écrire son propre code. Un hommage pictural tant à Fairhurst qu’à Bacon, un hommage à Hirst aussi. Et surtout.

audrey nervi axel pahlavi damien hirst

Et pendant ce temps là, en France ?....


Il faut bien commencer par avouer que voir Hirst comme un peintre, c’est déjà un acte quasi conceptuel. Et pourtant. Sa relation intime et désordonnée avec la peinture est une (très) longue histoire. Il est d’ailleurs passé par à peu près tous les styles possibles : abstraction géometrico-conceptuelle (dot paintings), abstraction lyrique (spin paintings), hyperréalisme (fact paintings), figuration, monochrome et collage (butterfly paintings)… soit la quasi totalité des principaux mouvements du XXe siècle. Rien que ça. On peut se demander si ce garçon se cherche ou si, à force de trouver, il est en quête permanente d’un après…. Bref. Il était surtout amusant de constater qu’au même moment, trois visions de la peinture française étaient montrées. Si l’on peut passer rapidement sur Soulages tant tout (et le plus intéressant, sans doute) a été dit, écrit, lu, chanté (peut-être) sur sa rétrospective à Pompidou. Et qui oserait comparer notre monument national à un coupeur de vaches ?

A un autre niveau, deux expositions de la fin de l’année 2009 offrent des confrontations possibles : Hedonist N.E.E.T. d’Audrey Nervi chez Frank Elbaz et Planète interdite d’Axel Pahlavi chez Eva Hober. Deux artistes de la même génération (1974 et 1975), deux peintres figuratifs. Les comparaisons s’arrêtent là ? Presque.

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Techniquement, Audrey Nervi peint à l’huile sur des toiles de relativement petit format des sujets mettant en scène des portraits d’adolescents pris sur le vif, en pleine activité arrêtée. Son rendu a une sorte de voile qui enveloppe et met à mal la volonté hyperréaliste première. On parlerait d’ailleurs plus logiquement de réalisme poussé, travaillé, tant la forme et le fond s’éloignent de la précision et des thématiques socioculturelles du mouvement américain des années 1960. Et c’est bien le problème. Autant on peut toujours gloser sur l’aspect purement technique de la peintre, autant on ne peut pas grand chose pour les sujets représentés. Des adolescents vivant leur vie d’adolescents, sans retravail poétique ou puissant à la manière de Gus Van Sant, Harmony Korine, Larry Clark & Co. Une sorte de Flickr peint dont l’intérêt, l’implication, l’apport historique paraissent aussi flous que la peinture elle-même. Représentation générationnelle ? Ephemere et Nouvel ordre mondial, deux grands formats plus obscurs paraissent apporter une clé, proposer une relecture possible de l’ensemble sans pour autant convaincre.

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Des clés, on en manque également chez Axel Pahlavi. Et si ce dernier partage avec Hirst une certaine fascination pour Bacon et ses personnages hurlants ou « encubés », il dégage paradoxalement une véritable originalité, l’expression d’une personnalité. On pourrait toujours avancer qu’il est relativement aisé de provoquer à grands coups de cadavres, de sang, de gore et de grands formats. Il suffit pourtant de voir son Saint Michel pour comprendre qu’on navigue à un autre niveau. Mélanges d’un iconoclasme cohérent, travaille sur les matières picturales, érudition d’initié populaire, si Pahlavi parle aussi peut-être d’adolescents, il le fait de manière magistrale et maîtrisée. Le hasard est voulu et l’univers tourne autour d’un nouveau Dieu, capable de renverser les règles au sein même de la figuration. Comme un anarchiste chrétien ?

Et si, finalement, le grand jeu du "ne comparons pas l'incomparable" apportait beaucoup plus de réponses que de questions, et devenait, par la même occasion, un sacré filtre pour relire l'histoire et revoir les oeuvres ? Un peu comme porter les lunettes 3D d'Avatar ?

2 commentaires:

  1. comment parler de peinture et de peintre en citant damien hirst alors que ce champion de la finance conçoit l'art comme une marchandise...
    Peut etre faut il vous apprendre que ce sont ces 80 larbins qui peignent ces tableaux...
    Son rôle ne consiste qu'a faire monter les enchères Sotheby’s grâce à son hegde-fund...
    Alors avant de se poser en pseudo critique d'art, vous feriez mieux de réflechir aux sens des mots peintre et peinture...
    Mais les imposteurs savent se reconnaitrent et se complaisent à s'entre-lécher leur égos...

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  2. Cher ami,

    Sachez que je regrette tout d'abord que vous n'ayez pas compris en quoi la relation à la peinture chez Hirst était un acte quasi-conceptuel.

    Je regrette encore plus que vous n'ayez pas saisi en quoi l'oeuvre de Hirst apparaissait comme un miroir de la société dans laquelle il vit (ce qui est un des buts premiers de l'art, sans doute) et que le rôle de Hirst est justement d'écrire l'histoire de l'art.

    Oui, certes, les larbins peignent. Comme ceux de Rembrandt, autre champion de la finance et de la commande de son temps. Mais peut-être ne le portez-vous pas non plus en haute estime....

    J'imagine que vous pensez que Garouste c'est de la vraie peinture comparée aux barbouillages de Meese, que Freud est le dernier grand licencieux, que Toroni, il est bien gentil mais il se fout un peu de nous, et vous vous réjouissez sans doute de la réhabilitation (enfin !) de Gérôme et Cabanel par rapport à leurs dégénérés contemporains et aux nôtres.....

    Je serais, quoi qu'il en soit, ravi de discuter peinture avec vous. Je sens bien, en effet, derrière votre commentaire, que vous devez être, vous-même, un peintre "Anonyme"....

    Cordialement.

    A & E

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