FIAC 2009 : LE RETOUR DE L'HIPPOPOTAME NAIN

Depuis son déménagement, la Fiac a semble-t-il, repris un peu du lustre, forcément lumineux, de Paris. Et si elle a plus ou moins résisté aux crises comme à la concurrence, c’est peut-être parce qu’elle a été capable de maintenir un cap (disons de le recentrer) sur une certaine idée de la qualité et de sérieux.

Sarah Ortmeyer



Certes, la partie « art moderne » du Grand Palais paraît toujours aussi décalée et quelque peu anachronique (surtout si Art Paris se met à faire du contemporain) mais cela participe du prestige de la Foire. Une sorte de réminiscence du Grand Paris, celui où les artistes et le marché nous regardaient avec envie. Mais on dirait que l’on a de moins en moins envie de... rire désormais en parlant de Paris. Il est bien trop tôt pour parler de retour ou de faire des déclarations fracassantes, mais le fait que la France n’ait pas complètement disparu est assimilable à la fierté de voir un hippopotame nain continuer de patauger dans une flaque au Libéria.... Et c’est déjà pas si mal.

Et l’édition 2009 concourt à cette vision de sérieux que la Fiac a érigée en principe. Loin du Magical Mystery Tour de la Frieze qui a envoyé M. Loyal en dépression, mais loin aussi de la démesure de Bâle. Si la Fiac a la bonne idée de se balader main dans la main avec des institutions françaises qui se déterrent et s’aperçoivent que le monde a continué à tourner sans elles (ce qui leur a valu un sacré mal au coeur au réveil), on est en droit de se dire que tout n’est peut-être pas totalement perdu. Certes, il reste des zones d’ombres à la taille d’un continent mais essayons de nous « souvenir des belles choses » (ah le cinéma français !). Et parmi ce peuple de l’ombre, on est sans doute en droit de s’interroger sur nos chères têtes blondes de gondoles, les artistes français. Où sont-ils passé ? Malgré l’éclairage blafard du Prix Marcel Duchamp et du Prix Ricard (à quand le Prix du Prix ?), on ne sait si c’est le pseudo-sérieux affiché qui a tué la jeunesse ou si l’on a que ce que l’on mérite mais des institutions et acteurs sérieux et suffisamment forts pour soutenir et défendre une scène décomplexée, est-ce trop demander ? Etre libre ne veut pas dire faire n’importe quoi (on y reviendra), mais on aimerait tellement qu’une Marie-Pierre Casey de l’art se jette sur la table poussiéreuse de l’art contemporain hexagonal et nous donne un bon coup de Pliz (please...) ! Ecrasés par la tradition ? Même pas, et c’est peut-être ça le plus grave...

ARTY / RT :
Matthew Day Jackson donne une leçon, une correction, une démonstration de la puissance d’une oeuvre d’art en trois temps. Si la couverture du Time est la moins réussie des pièces exposées, l’étagère en forme de portrait primitif est exemplaire. Donald Judd de côté, Haim Steinbach de près, James Hopkins transcendé de loin, cet autoportrait totémique est vertigineux et touche au sublime accouplé de celui, photographique, de l’artiste mis en scène, mort à 35 ans. La confrontation des deux oeuvres vaut tous les discours critiques possibles et vous fait oublier, pour un instant, pour un instant seulement, que vous êtes au milieu d’une foire. Impressionnant. Ce doit être ça le rêve américain, les grandes étendues désertes de l’esprit et la démesure de l’émotion : comme un Paris, Texas en 3D.
Stand de la galerie Nicole Klagsbrun, Cour Carrée du Louvre.
Matthew Day Jackson

EMPTY / MT :
On vous jure que ce n’est (presque) pas fait exprès, mais la pièce « sans » (rien) de la foire revient à un français. Philippe Terrier-Hermann réussit le tour de force, lui aussi, de faire la démonstration en une oeuvre de tout ce qui ne faut pas faire. Son Top 50, une série de noms d’artistes traités sur un format publicitaire, leur patronyme écrit « à la manière de » leur oeuvre respective. En gros, un exercice de 1ère année d’à peu près toutes les écoles de Beaux-Arts de France, qui n’est en plus, le comble, pas plus réussi que cela. Et encore, on espère que ce n’est pas une critique de la marchandisation de l’art ou de la starisation de l’artiste parce que là on atteindrait des sommets de gouffre. Si, et cela vaut pour M.D. Jackson ci-dessus, il n’est jamais bon de juger un artiste sur une oeuvre et encore moins lorsque celle-ci est présentée dans une foire, on peut cependant en déduire une certaine tournure d’esprit et de qualités conceptuelles dans un exercice difficile et qui demande beaucoup pour ne pas finir noyer dans la m/(n)asse des oeuvres in/(ré)gurgitées. Quoique, des fois, on se demande s’il ne vaudrait pas mieux se faire discret....
philippe terrier hermann fiac top 50 blanchisserie
Stand de la galerie La Blanchisserie, Cour Carrée du Louvre.

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