PIMP MY RIDE

« Une automobile de course avec son coffre orné de gros tuyaux tels des serpents à l'haleine explosive ... une automobile rugissante qui semble courir sur la mitraille est plus belle que la Victoire de Samothrace » F.T. Marinetti

tuomo manninen voiture



Depuis le 15 octobre (et jusqu’au 26 janvier 2009), les délinquants futuristes envahissent le Centre Pompidou. Glorifiant la guerre, la destruction et l’incendie volontaire, on ne peut pas dire que cette bande d’italiens enragés soit le prototype du gendre idéal, ni de l’artiste académique d’ailleurs. Seulement voilà, tout à une fin. Malheureusement une fin qu’ils n’avaient pas prévue. Alors qu’ils demandaient d’être « jetés au panier comme des manuscrits inutiles » puis assassinés par « des plus jeunes et plus vaillants », ils se retrouvent placés sous les feux d’un de ces musées prestigieux, «
ces cimetières d'efforts perdus, ces calvaires de rêves crucifiés, ces registres d'élans brisés ». On ne choisit pas toujours sa fin… Toujours est-il qu’ils exhortaient déjà l’automobile comme un monstre flamboyant capable d’incendier l’art, d’affoler nos sens, d’effrayer les valeurs de la société.

Certes, il paraît un peu cavalier de considérer les incendies de voitures qui enfument régulièrement les actualités (Vitry-le-François, « from Paris with Love »… and from Montfermeil with Hate, projet cramé de Luc Besson, ou encore la « guerre civile » de 2005) comme des œuvres d’art et nos charmants incendiaires comme des artistes maudits ou des visionnaires futuristes. Cependant, il n’est pas inenvisageable qu’il y ait un message derrière tout ça. Pas un concept, mais un cri d’alarme. Une sirène de pompier. Pour un raccourci rapidement résumé et une (éventuelle) bande-son idéale, voir le clip « Stress » de Romain Gavras pour Justice.

Les descendantes de l’Obéissante ou de la Jamais Contente (et oui, l’ancêtre poétique de votre 307…) ont largement inspirées nombre d’artistes contemporains, sous des formes diverses et variées de maltraitances et d’expressions de la violence. On ne pense pas ici aux gavages d’Erwin Wurm et à ses véhicules joufflus mais bien plutôt à des volontés déterminées à faire souffrir notre deuxième meilleur ami… après la télévision. Le précurseur de cette école du Crash (impossible de ne pas citer J.G. Ballard et Cronenberg… indépassable !) est sans doute le Nouvellement honoré César Baldaccini. Compressions en tout genre pour des véhicules rendus réduits au minimalisme esthétique, destruction radicale des illusions consommatrices en plein milieu des années 1960. A la question « que faire de sa carcasse ? », certains artistes ont choisi de traiter le cadavre comme un matériau brut. Ainsi, Charles Ray dans Unpainted Sculpture, 1997, moule un reste accidenté de Pontiac Gran Am pour la recomposer à l’identique en fibre de verre. Sylvie Fleury, comme à son habitude, mélange érotisme, luxe, humour, féminité et violence dans la série des Skin Crime qui recouvre de couleurs attirantes les décombres d’automobiles. Une technique que l’on retrouve chez l’écossaise Rory MacBeth qui travaille à la peintures les épaves abandonnées et les laisse in situ afin de créer un décalage incongru et poétique dans une réalité souvent empreinte de violence. Difficile de ne pas citer Adel Abdessemed dans un article qui compare des œuvres entre elles (!). L’artiste nous offrait en 2006 avec Practice Zero Tolerance une reproduction taille réelle de voiture carbonisée en céramique. La confrontation des contraires s’affirme avec Who, among you, deserves eternal life? D’Erik Smith. Deux voitures, une blanche, une noire, s’interrogent dans une suspension du temps, dans un au-delà des limites de la sculpture. Nicolas Descottes, enfin, réintroduit une violence froide dans ses clichés de véhicules en feu ou stoppés dans leurs courses folles par des poteaux : l’absurdité de la vie donne presque envie de sourire.

christoph buchel voiture

Les dernières foires parisiennes n’ont fait que confirmer cette tendance actuelle du marché. The car show de Tuomo Manninen chez Analix Forever, des photos lisses et (re)posées de voitures accidentées, les pare-brises brillamment travaillés de Guillaume Cabantous chez Odile Ouizeman, la Suicide car (Ford Scorpio Ghia) de Christoph Büchel chez Hauser & Wirth, épave explosée recomposée diffusant les actualités sur la radio en marche. Des traces de notre fragilité, la confrontation à la plus sourde et contenue de nos violences quotidiennes. Attachez vos ceintures, les artistes vous amènent, à leurs côtés, dans un voyage vers la fin. Place du mort ou grand brûlé ? A vous de choisir…


PIMP MY RIDE.

A racing automobile with its bonnet adorned with great tubes like serpents with explosive breath ... a roaring motor car which seems to run on machine-gun fire, is more beautiful than the Victory of Samothrace” F.T. Marinetti

From October 15th to January 26th, 2009, the futurist outlaws invade the Pompidou Center. They glorified war, destruction and arson and one will certainly fail to find, in this group of enraged Italians, the ideal son-in-law or a model for academic artists. Unfortunately, everything must come to an end. And not always the way you imagined it would. And though they asked once begged to be “thrown in the waste paper basket like useless manuscripts” and to be murdered by “younger and stronger men”, they actually end up under the spotlights of a prestigious museum, one of “those cemeteries of wasted effort, calvaries of crucified dreams, registers of false starts”. You can’t always choose which way you’ll finally go. Throughout time, they exhorted the automobile as a blazing monster which could burn down art, throw our senses into panic mode and scare society’s values.

Of course, it seems a little bit flippant to consider car arsons, such as those which regularly smoke out the breaking news section (Vitry-le-François, “From Paris with Love”… and “From Montfermeil with Hate”, a burned-out project by Luc Besson, the “Civil War” in 2005) like works of art and the charming arsonists like damned artists or visionary futurists. However, it is not totally stupid to consider there might a message behind the smoke. Not a concept, but a shout for help. A fire alarm. For a short and quick summary and (eventually) the ideal soundtrack, watch the video “Stress”, which Romain Gavras directed for the band Justice.

The descendants of The Obedient or of The Never Happy (ancient and poetic name of your actual Peugeot 307) have greatly inspired numerous contemporary artists, in different and various aspects of mistreatments and expressions of violence. No reference here to Erwin Wurm’s force-fed and chubby cars but rather to what appears as determined wishes to inflict pain to our next best friend… after television. The pioneer of this Crash-esque scene (no way we can avoid mentioning J.G. Ballard and Cronenberg… no way!) is certainly Cesar Baldaccini. Compressions of vehicles reduced to an aesthetical minimalism, radical destruction of the illusory consumptions during the mid 60s. Question: “what to do with a car’s empty metal frame?”. Artists answer by dealing with the carcass as raw material. On Unpainted Sculpture, 1997, Charles Ray casts damaged remains of Pontiac Gran Am and reconstructs it exactly on fiberglass. Sylvie Fleury, as usual, mixes eroticism, luxury, humor, femininity and violence into her Skin Crime series, covering dead cars with shiny colors. A technique similarly used by the Scottish artist Rory MacBeth who paints abandoned wrecks and leaves them in situ, creating an incongruous and poetic gap in a reality filled up with violence. It’d be hard not to mention Adel Abdessemed in an article, which draws comparisons between works (!). The piece Practice Zero Tolerance, 2006, was a life-sized carbonic reproduction of a burnt car. The confrontation of the oppositions becomes apparent on Who, among you, deserves eternal life? by Erik Smith. Two cars, a black one, and a white one, question themselves during a suspended time beyond sculpture limits. Nicolas Descottes, finally, reintroduces cold violence in his photographs of burning vehicles or stopped by goalposts during their crazy races: the absurdity of life could even makes us smile.

The recent Paris fairs confirmed the current market trend. The Car Show by Tuomo Manninen at Analix Forever Gallery, smooth and resting pictures of crashed cars, the perfectly warped windshields by Guillaume Cabantous at Odile Ouizeman gallery, the Suicide Car (Ford Scorpio Ghia) by Christoph Büchel at Hauser & Wirth gallery, a recomposed blown-up wreck with breaking news broadcasted by the car’s radio. Traces of our fragility, confrontations of the dull and contained everyday violence. Fasten your seat belts as artists bring you, by their, side, on a deaddly trip. Dead seat or burnt to death spot? Take your pick…

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