FIAC, SHOW OFF, SLICK, DIVA : LES 4 FANTASTIQUES

Les quatre principales foires parisiennes sont sans aucun doute les super-héros de cette fin octobre. La presse est en émoi, les collectionneurs, scrutés, les galeries, sous-tension, et l’art,… inquiet ?


La Fiac : Mr Fantastique.

zombies jim shaw



La Foire Internationale d’Art Contemporain est le leader incontesté de la joyeuse bande d’étalagistes de l’art. La plus ancienne, la plus renommée, la plus attendue aussi. A l’instar de Reed Richards, Mr Fantastique, elle joue cette année à l’Homme élastique. Grand Palais, Cour carrée du Louvre, Jardin des Tuileries, Prix Marcel Duchamp, programme de performances
Ouvertures/Openings avec le Louvre et le Jeu de Paume… difficile d’échapper à ses bras tentaculaires. Revigorée depuis 2006 par un déménagement aventureux et un duo composé de Martin Bethenod et Jennifer Flay, la Fiac retrouve des couleurs et semble attirer de nouveau l’attention internationale. Pas besoin de rentrer dans les chiffres (taux d’internationalisation, chiffre d’affaire global, poids moyen du visiteur à l’entrée, indexation sur le cours de la bourse, tout y passe), la France a besoin d’une Fiac forte, dynamique, attirante. Certains se plaignent déjà du recul des galeries historiques françaises et de la distance prise par rapport à la « spécificité française » de l’art moderne. Nostalgie d’un âge d’or du marché français qui a sans doute contribué à empêcher la France d’avancer avec son temps. On craint que la Fiac ne se distingue plus de ses consœurs que sont Frieze ou Basel… quel malheur : devenir incontournable !... Il semble pourtant judicieux de se battre avec les mêmes armes que les autres et ne plus penser que, finalement, un retour de l’impressionnisme ou du pompier ne serait pas si inintéressant (on a déjà suffisamment de « jeunes artistes vieux » comme Armand Jalut ou Marlène Mocquet qui nous renvoie au début du siècle passé….). En résumé, on peut noter un net resserrement des galeries autour de valeurs fortes, comme le montrent les trois solos shows de l’explosif Marc Quinn chez Hopkins Custot, le magnifique de sobriété Christopher Wool chez Luhring Augustine et le démentiel Jake & Dinos Chapman au White Cube. Pas beaucoup de surprises, peu de risques, même venant de galeries que l’on attendait sur ce terrain là, telles que Eva Hober ou Peres Projects. Au milieu des géants établis (le spectaculaire Hauser & Wirth, la très belle mise en scène de Thaddaeus Ropac), certains tirent leur épingle du jeu comme la Cosmic Galerie (la guitare limpide de James Hopkins) ou le stand efficace de Bernier/Eliades. En tout cas, effet de crise ou pas, le sérieux était de mise. Et ce n’est pas forcément plus mal. A défaut d’être Fantastique, la Fiac a fièrement défendu son rang.


Show Off : la Torche Humaine.

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Née sur les cendres des « refusés de la Fiac », Show Off est en train de gagner son pari de devenir une foire solide à part entière. La première impression de cette édition 2008 provoquait pourtant un vilain retour de flammes sur la qualité, non pas tant des exposants, que des exposés. Mais c’était avant de voir Slick… A dire vrai, il semblait même quasiment dispensable de passer la première ligne de galeries après le comptoir d’accueil et le duo Odile Ouizeman et Olivier Robert. Deux galeries exemplaires de sérieux et de créativité. Le dernier cité, impeccable dans l’accrochage (l’espace approprié de David Ancelin ou les peintures envoûtantes d’Elodie Lesourd), pourrait sans souci postuler à rejoindre les forces de Mr Fantastique. Le reste des pièces paraissaient légères dans l’ensemble, à quelques exceptions prêt, comme celles du (pourtant limite) artiste Scott Campbell chez Flat Massimo Carasi ou les œuvres des protégés d’Analix Forever, tous mus par un même élan de recherche artistique. Des vrais ratés (la School Gallery) mais aussi de jolies découvertes (Jodie Carey chez Daneyal Mahmood Gallery, Yuki Onodera chez RX). Incendiaire, Show Off ne l’était pas, mais dynamique, volontaire, décidée à chauffer les oreilles de sa grande sœur, certainement. Luttant avec ses armes et un lieu délicat à exploiter, elle ne s’en sort finalement pas si mal, modifiant sa position d’antichambre de la Fiac vers un statut légitime de foire indépendante de qualité. Reste à ne pas se brûler les ailes.


Slick : la Chose.

Chris Roberts-Antieau

Benjamin Jacob Grimm, surnommé la Chose, est un être à l’apparence étrange et à la forme indéfinissable. Il est surtout doté d’une immense force physique. Certes, Slick a, cette année, sans aucun doute possible, profiter de son déménagement au 104, lieu immense et propice à la création d’une foire d’envergure, mélange de Grand Palais et de Porte de Versailles. Seulement, le monstre nouveau est un colosse aux pieds d’argile. Beaucoup d’espace et un vague sentiment de remplissage. Une intention difficile à définir. Populaire, sérieuse, jeune, établie ? La Chose ne sait pas quelle forme incarner. Très colorée (les stands de Cinthya Corbett, Vanessa Suchar, Duplex), frôlant (galerie W) ou percutant (Studio 55, Eugenio Merino chez Adn Galeria) le ridicule, intéressant (Catherine Issert, Vf Galerie, Corbett Projects) ou franchement très bon (le folk sudiste parfait de cohérence chez Red Truck Gallery), voire le Bof (Addict), le Burp (Galerie Una, China Beauty), le Bling bling, crânes et conneries (Art Jingle Contemporary), le Waouh (Lhk, Norbert Pastor)… Slick souffle le chaud et le glacé. Il ne paraitrait pas totalement idiot de faire une sélection l’année prochaine, et une sévère, afin d’exploiter au mieux le potentiel du lieu et développer totalement les galeries pertinentes qui se présentent. A moins que le but soit de faire une fête populaire de l’art, sorte de Foire du Trône culturelle… mais ça c’est autre Chose.


Diva : La Femme Invisible.

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Certes, Diva Art Fair ne jouit pas d’une grande visibilité, ni d’un grand battage médiatique autour de sa présence. Son lieu de diffusion (le très bel hôtel Kube), sa sélection limitée (11 galeries) et son champ restreint (l’art numérique) la prédestine à une certaine confidentialité. Pourtant, son rapport à la Femme Invisible ne se limite pas à cela. Elle est aussi une foire vaporeuse, immatérielle, diffuse, capable d’utiliser des champs de force. Si le lieu semble idéal pour apprécier pleinement la diffusion de vidéos, il ne paraît pas être totalement formaté pour s’appréhender comme un lieu de vente. Plus échange culturel que négociation commerciale. Malgré de bonnes surprises (la très belle présentation de Widmer & Theodoris, les vidéos de Katarina Zdjelar chez Mirta Demare ou Alberto Borea chez Isabel Hurley) et de vrais surprises (Nora Haime qui ne présente quasiment que… des dessins (!) et Isabel Hurley qui attire le regard par son choix de photos…), Diva souffre d’un certain manque d’envergure. Foire cohérente mais élitiste (sans même évoquer le tarif d’entrée prohibitif), esseulée mais novatrice (la vente aux enchères d’art numérique de l’incontournable Cornette de Saint-Cyr). Précisément, le médium numérique n’est pas le plus aimé et sa relative absence dans les autres foires tend à soulever deux interrogations : Diva est-elle très (trop) en avance sur son temps, ou est-elle amenée… à disparaître ?

La joyeuse bande des 4 foires fantastiques se complètent finalement assez bien et dégagent chacune des spécificités propres dans lesquelles chaque spectateur peut se retrouver et s’identifier. Finalement, ce qui pourrait être un signe inquiétant n’est pas tant la marchandisation de l’art (quoi de plus normal dans une foire ?) que sa disparition. Quantité et qualité devraient être deux notions à méditer et à mettre dans la balance afin de pouvoir justifier, lors de la prochaine tournée, d’un écrémage bienvenu. L’art ne peut se contenter de héros, il veut des… super-héros.

Fiac, Show Off, Slick, Diva: the Fantastic Four.

The four main Parisian art fairs are the superheroes of this end of October. The press is excited, the art collectors are under tight scrutiny, the art galleries are stressed and art is… worried?

The Fiac: Mr. Fantastic.

The International Contemporary Art Fair is the undisputed leader of the happy art window dressers group. The oldest, most renowned, most anticipated one too. This year, like Reed Richards/Mr. Fantastic, it acts as Elastic Man. Grand Palais, Cour Carrée du Louvre Jardin des Tuileries, Marcel Duchamp Prize, Opening performances programs with the Louvre and the Jeu de Paume museums… hard to escape from its sprawling arms. Since 2006, the fair has regenerated to a risky move and to the Martin Bethenod - Jennifer Flay duet and has grown, drawing international attention once again. No matter the figures (internationalization rates, global sales, average weight of entering spectator, indexation on stock exchange prices: everything is under control), France needs a strong, dynamic and appealing Fiac. Some critics have complained about the absence of some historical French galleries and about some detachment towards the specific modern art called “French exception”. They are nostalgic of the golden age in the French art market that probably contributed to prevent France from moving forward. They fear that the Fiac will be no longer different from the Frieze Art Fair or Art Basel… What a shame: becoming incontrovertible!... It seems more judicious to fight the competitors with the same weapons and to stop thinking that, finally, the come back of the impressionist or academism movements could be a good thing (We already have our “old new artists” such as Armand Jalut or Marlène Mocquet, who reminisce of last century’s beginnings). Notice how galleries clearly exhibit their strongest values, as these three solo shows prove it: the explosive Marc Quinn at the Hopkins Custot Gallery, the magnificently sober Christopher Wool at the Luhring Augustine Gallery, and the demoniac Jake & Dinos Chapman at the White Cube gallery. Few surprises, few risks are to be found, even from expected galleries like Eva Hober or Peres Projects. In the middle of established giants (a spectacular Hauser & Wirth stand and a beautiful display at the Thaddaeus Ropac gallery), some galleries stand out while the going is good: the Cosmic Gallery (and a brilliant guitar by James Hopkins) or the efficient stand of the Bernier/Eliades Gallery. Crisis effect or not, seriousness was really present. And it is not necessarily a bad thing. Not really Fantastic but the Fiac proudly put up a fight for its place.

Show Off: the Human Torch.

Born from the Fiac-denied galleries ashes, Show Off is becoming a strong and independent art fair. First take on the 2008 edition felt like a mean backlash in terms of quality, not of the exhibitors, but of the exhibited. But that was before visiting the Slick art fair… Truly, you did not have to go further than the reception desk, and the two galleries Odile Ouizeman and Oliver Robert. Two exemplary galleries, serious and creative. Olivier Robert, perfect in his hanging (the appropriated space by David Ancelin, the magical paintings by Elodie Lesourd) could obviously pretend to join the Mr. Fantastic forces. The rest of the works looked a little bit weak, exception be made for the (not totally) artist Scott Campbell at Massimo Carasi Gallery or the artworks presented at Analix Forever, by a group of artists all motivated by the same artistic quest/wish. There we some real failed attempts (School Gallery) as well as nice discoveries (Jodey Carey at the Daneyal Mahmood Gallery, Yuki Onodera at the RX Gallery). Show Off didn’t burn, but it was certainly dynamic and determined to compete with the Fiac. Fighting with its own weapons and dealing with a delicate place in which to show the works, it moves from an anteroom position to a lawful status of qualitative and dynamic art fair. All Show Off needs now, is to avoid getting too close to the sun.

Slick: the Thing.

Benjamin Jacob Grimm, alias the Thing, is a human being with a strange appearance and a nondescript form. He also benefits from incredible physical strength. Obviously, Slick took advantage of its move to the 104, a gigantic place adapted to a great fair, a mix between the Grand Palais and the Porte de Versailles space. But the new monster is a giant with clay feet. A lot of space and a vague sense of filling. An unclear intention: popular, serious, young, established? The Thing does not know what to incarnate. Colorful (the Cinthya Corbett stand, Vanessa Suchar and Duplex galleries); flirting with (W Gallery) or crashing into (Studio 55, Eugenio Merino at the ADN Galeria) ridicule; interesting (Catherine Issert, Vf Gallery, Corbett Projects) or honest to god great (the perfectly coherent southern folk at the Red Truck Gallery); but, also, so so (Addict), Burp (Una Gallery, China Beauty), bling bling, skulls and bullshits (Art Jingle Contemporary), or Wow (LHK, Norbert Pastor). Slick swims between hot and cold waters. It would make sense, next year, to offer ab actual selection, seriously, and to profit from the potential of some pertinent galleries. Well, unless they decide to do a popular art party, a kind of cultural bedlam… but that’s another Thing.

Diva: the Invisible Woman.

Diva suffers from a lack of visibility and publicity. Its location (the very beautiful Kube Hotel), its limited selection (11 galleries) and its restricted aim (to exhibit numeric art) predestine it to certain confidentiality. But that is not the only common point with the Invisible Woman. It is also a vaporous fair, immaterial, and vague, which is able to use powerful fields. The place is perfect to appreciate digital works and videos, but it seems inappropriate for sales, close as it seems to being a space dedicated to cultural exchanges rather than to commercial negotiations. Despite a few good surprises (the great presentation of the Widmer & Theodoris Gallery, the video of Katarina Zdjelar at the Mirta Demare Gallery or Alberto Borea at the Isabel Hurley Gallery), some real surprises (Nora Haime Gallery exhibiting almost exclusively… drawings! And Isabel Hurley presenting interesting photographs), Diva suffers from a lack of stature. It’s a coherent but elitist fair (including the prohibitive price of its ticket), lonely but innovative (a numeric art auction by Cornette de Saint-Cyr). To be fair, digital art is not the market’s favorite medium and its relative absence on others fairs proves it, so, it raises two questions: Is Diva very (too much) in advance or is it destined to… disappear?

This great group of 4 Fantastic Fairs is complete and complementary, each one has its own specificities and particularities, among which everyone can find a shoe that’ll fit, bring pleasure and identification. In the end, the only thing that could be frightening is not the art commercialization trend (logical on a fair) but its disappearance. Quantity and quality should be meditated and pondered, in order to allow, next year, a stronger selection. Art will not be satisfied with heroes. What Art wants and needs is… super heroes.

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