PARTIE DE MANTIQUE MENTEUSE

Le Prix Marcel Duchamp est devenu, depuis sa création en 2000, un événement incontournable du paysage de l’art français. Crée par l’Adiaf suivant des modèles (comme bien souvent, et ce, quels que soient les domaines) anglo-saxons, investissant, le temps d’une gloire éphémère, le champ de la récompense auto-glorifiée du micro-marché de l’art contemporain. De (du)champ justement il est question tant l’annonce des candidats à la course pour la gerbe finale ressemble à une compétition de sauts d’obstacles de dada(ïste)s…

nicolas moulin prix marcel duchamp



Pour nous, pauvres mortels, il est évident que l’envers des tractations, les finesses, les déguisements et déboires, nous échappent complètement. Pour ceux qui souhaiteraient vivre de l’intérieur et comprendre l’inaccessible, nous vous recommandons plus que vivement la lecture de l’expérience duchampienne racontée de main de maître par (l’excellentissime)
Olivier Blanckart, nominé en 2005, mineur décrivant la descente dans les tréfonds infernaux de l’art français…

Pour les autres qui, comme nous, surnagent en surface, nous tenterons seulement d’éclaircir le cru 2009 suite à l’annonce des nominés. 4 hommes cette année engagée dans cette élégante foire d’empoigne : Saâdane Afif, Damien Deroubaix, Nicolas Moulin, Philippe Perrot. Alors, quels sont les pronostics ; les chances de chacun, d’un point de vue purement artistique (le seul élément, bien évidemment pris en compte dans l’attribution du prix final : pourquoi préciser ?) ; notre point de vue en (potentiel) désaccord avec le résultat final… d’octobre.

Néons et crânes de Vanité : est-il réellement besoin d’en dire plus ? Le travail de Saâdane Afif est connu et reconnu mais ni connaissable, ni reconnaissable. Définitivement pas artiste rock (le rock n’est pas cette chose, prostituée à grimer pour se donner l’air cool), pas franchement artiste hype, pas mauvais artiste non plus, plutôt artiste français au goût Celador (mais si, vous savez, le bonbon ridicule) : le « goût de l’illusion » comme disait l’autre… Mais Afif ne paraît pas être un très bon prestidigitateur.

Damien Deroubaix, lui, sent le rock, mais plutôt vieille odeur de bière rance et de vomi. Le mélange proposé mort-nazi-porno-rock (grind pour les pointilleux) n’est ni franchement novateur, ni complètement la plus pertinente des interactions possibles. S’il est sans doute largement exagérer d’évoquer le nom des Dada pour parler de son travail (Schwitters était punk, Deroubaix certainement pas), un sens certain de la composition (et des bons goûts musicaux) sauvent un travail paradoxalement plat ; ses efforts de transgression demeurant malheureusement inaboutis.

Nicolas Moulin travaille des architectures irréelles avec une sobriété et une élégance impressionnante. Tout est juste, mesuré jusque dans la démesure, précis et efficace, ne ratant jamais une cible (é)mouvante. Le silence de ses œuvres appelle le notre. Une réflexion qui n’envahit pas l’espace mais colonise notre esprit. Une démonstration de force et d’invasion artistique.

Philippe Perrot est peintre. Etonnant, non ? La mort de la peinture, maintes fois annoncée, n’était-elle qu’un rituel illusoire et mercantile ? Mais Philippe Perrot est vraiment peintre. On peut ne pas être sensible à son style, certes, mais il a le mérite d’en avoir un. C’est étrange, mixe les références et les référents, pas fait pour une recherche désespérée de l’esthétique, pas débordant de concepts (plus) ou moins utiles et pertinents, mais cela fait tout de même remonter des émotions enfouies sur fond de scandale doucereux. C’est de la peinture. Avec ce que cela comporte de bon et de moins bon. A réserver aux amateurs….

philippe perrot prix marcel duchamp

Si l’on résume aussi grossièrement que l’idée même de médailler un artiste, on dira donc : 1- Moulin, 2- Perrot, 3- Afif, 4- Deroubaix (malgré la photo finish pour les 2 derniers) et on vous conseille plutôt de parier et de miser sur : 1- Afif, 2- Deroubaix, 3- Perrot, 4- Moulin. Les paris sont ouverts. Attention aux grosses cotes. Pas de quoi fouetter un jockey de toute façon…


Game of liar’s mantic.

Marcel Duchamp prize became, since its creation on 2000, an event that can’t be ignored by French art market. Created by the Adiaf, following Anglo-Saxon examples (as usual, and no matter what domain is concerned) and interfering, during an ephemera glory, with the self-glorified award field of the contemporary art micro-market. The field is basically evocated when the nominated are named, entering a race for the final bouquet that looks like a horseracing with fences and hurdles.

As far as we are concerned, we obviously and totally ignore backstage, negotiations, subtleties, camouflages and confusions. For the ones who would like to fathom and understand the unreachable, we strongly recommend them to read the duchampian experience, masterly told by the great artist Olivier Blanckart, nominated on 2005, pit worker describing the descent on the very depth of French evil art…

For the others who, like us, are floating on surface, we are going to try to enlighten the 2009 edition. The 4 nominees are already known, 4 men are engaged on this elegant rat race: Saâdane Afif, Damien Deroubaix, Nicolas Moulin, Philippe Perrot. So, what are the forecasts, the individual chances from a purely artistic viewpoint (the only one considered for the attribution: no needs to precise), our own point of view potentially disagreeing the final result… of October.

Neon and skulls: do we really have to say more? The work of Saâdane Afif is known and renowned, but neither knowable nor recognizable. He is definitively not a rock artist (rock music is not this thing, a prostitute to make up in order to look cool), not really a hype artist, not a bad artist, much more a French artist with Celador flavor (you know, the stupid candy): the “illusion taste” said the other guy… but Afif does not seem to be a good magician.

Damien Deroubaix smells rock, old rancid beer odor and vomit. The mix death-nazi-porn-rock (grind for the fussy ones) is not frankly innovative, not totally the most relevant possibility of interactions too. It’s completely exaggerated to mention Dada for his work (Schwitters was a punk, certainly not Deroubaix), a sure sense of composition (and good musical tastes) save a work paradoxically lifeless; his transgression attempts unfortunately fail.

Nicolas Moulin works on unreal architectures with soberness and impressive elegance. Everything is in its right place, measured even on outrageousness, sharp and efficient, never missing a (emotive) target. Silence from his pieces appeals our own silence. The reflection does not invade space but colonizes our mind. A demonstration of strength and artistic invasion.

Philippe Perrot is a painter. Surprising, right? Is the death of painting, repeatedly announced, only an illusory and mercantile ritual? But Philippe Perrot is really a painter. We can be not sensitive to his style, but he has one. It’s strange, mixing references and referents, not desperately looking for aesthetic, not (more or less relevant) conceptually overactive, but it traces back buried emotions on a smooth scandal background. It’s painting. For better or for worse. For amateurs only…

To summarize, as rudely as the idea to give a medal to artists, let’s say: 1- Moulin, 2- Perrot, 3- Afif, 4- Deroubaix (photo finish for the two last ones) and we advise you to bet on: 1- Afif, 2- Deroubaix, 3- Perrot, 4- Moulin. You can bet. Beware the high odds. There’s no reason to whip a jockey anyway…

2 commentaires:

  1. Bravo RT/MT... quel oeil !
    Afif a bien été intronisé !
    Et dire qu'il est L'ARTISTE qui travaille sur le musique et le rock en France !

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  2. A noter la consécration parallèle de Tursic & Mille au Prix Ricard...
    On vous laisse juger de la pertinence (ou non ?) de la vision de l'art contemporain que l'on choisit de promouvoir en France....

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