DRAN : UN DRAM ?

Retour express et sommaire sur la place du discours sur l’art dans la création actuelle.

dran

Dans Artpress n°361, Richard Leydier dans son compte-rendu sur la X° Biennale d’art contemporain de Lyon évoque rapidement l’exposition « Rendez-vous 09 » à l’IAC de Villeurbanne. Il cite notamment le cas de l’artiste Dran en ces termes :

« la révélation de cette exposition, ce sont les dessins que Dran réalise sur des cartons de récupération, à partir des mentions qui y sont déjà imprimées ». Rien de véritablement choquant ni quoi que ce soit qui puisse soulever une quelconque polémique. Pourtant, cela pose un certain nombre d’interrogations. La première, la plus superficielle, est la place à donner à un illustrateur de presse, reconverti art contemporain et désigné héraut « street artiste », sur la scène artistique. La surabondance de l’art urbain sur le marché actuel peut être au mieux, ou au pire, comme un effet de mode. Les expositions et publications diverses se multiplient sans que personne ne semble vraiment se poser la question de savoir que devient le statut des oeuvres à partir du moment où elles sortent de leur contexte originel. Cela n’a l’air de rien, mais exposer un tag, c’est un peu rejouer le ready-made duchampien, dans le geste de déplacement... simple détail. Et l’on ne rentre même pas dans le débat sur la volonté créatrice et l’acte réfléchi, mais on y vient.

Car, et de manière plus sournoise, le cas de Dran soulève un autre questionnement. En effet, les oeuvres de Dran ne sont pas inintéressantes, loin de là. Les jeux d’esprit et l’humour présents s’accordent parfaitement avec le matériel récupéré et le style graphique appliqué. Seulement voilà, pour avoir assisté à la présentation de son travail par l’artiste, on peut aisément remettre en question le statut de la critique contemporaine. Le discours simpliste et volontiers doucereusement moralisateur, pour ne pas dire un peu mièvre, voire Miss Francisé, de l’auteur, remet sur le devant de la scène tout ce qui ne faut pas voir (ou dire) sur son travail. Alors comment faire ? Est-ce le rôle de l’artiste de parler de son travail, et plus encore, de le défendre ? La critique ne cherche-t-elle pas toujours à intellectualiser le ressenti premier et im-médiat ? Est-elle là forcément pour « rendre intelligent » ou voir ce qui échappe ? Ne devient-elle pas dès lors artiste à la place du calife ? Se tromper, même en bien, sur les intentions d’un artiste, est-il source de déception et d’erreur ?

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Alors que l’on entend trop souvent le public se plaindre de se retrouver seul et souvent démuni face à des oeuvres qu’il ne comprend pas et qui se refusent à lui, ne laissant pas aux oeuvres assez de place à l’émotion, physique ou psychique, on n’avait pas forcément envisagé le cas contraire : que l’information obscurcisse ou éclaire mal l’oeuvre mentionnée. Car, s’il est évident que connaître les enjeux d’un travail d’apparence froide ou conceptuel peut aider à découvrir les portées et ouvrir des perceptions et dimensions pertinentes (prenons Felix Gonzalez-Torres comme témoin A de l’expérience), il est de même certain qu’il vaut mieux parfois se laisser seul juge devant une oeuvre, quitte à adorer un veau d’or.... et de carton.

5 commentaires:

  1. (haute-savoie le 13.10.2009)
    J'ai visité une exposition de ses cartons hier a Villeurbanne. Comment dire?.. Dran sauve l'expo! Choquant, drole, acide et amer a la fois. Le support , souvent sale et irregulier, rend encore plus troublant ces dessins teintés d'humour tres noir. (un enfant handicapé sur un emballage frappé "ne pas renversé" ou encore un cowboy marlboro cancéreux et rabougris sur un carton de cigarettes de cette marque) J'ai eu beau passé de cartons en cartons ( a peu pres une vingtaine ) je n'ai pas trouvé mon préféré! Mon seul regret: ne pas avoir eu mon appareil photo hier! A voir et a revoir!!

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  2. SAUVE L'EXPO ????? De quoi ? D'être tout simplement une bonne expo de jeunes artistes contemporains ? A mon sens, avec Dran, se produit l'inverse... Une sortie de route, un hors sujet...

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  3. pour effectuer une sortie de route faudrait il encore qu'il y ait un fil conducteur... cette exposition n'a ni queue ni tête, je faisais juste part de mon ressentis...je me suis fait chier jusqu'a la derniere salle, celle de dran.

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  4. ça va tu t es laché sur ton article; je vais te rassure deux secondes; je suis d accord avec toi que j ai pourri mon travail a le présenter, pour les 20 personnes présentes; moi j ai fait cette série pour laisser les gens seuls devant ; je me suis fait embarquer par l institut pour faire ce que je n aime pas faire; parler ;
    c est des opinions comme le tien qui serve a quelque chose quand on veut un peu de recul;
    mais comme je suis puéril; je te fais quand meme un doigt pour te dire aurevoir

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  5. Cher "Dranonyme",

    Merci pour ton commentaire.
    Comme tu l'as parfaitement saisi, il s'agissait de s'interroger sur la place du discours dans la création actuelle et sur le mode d'expression à considérer prioritairement chez un artiste. Il était également, et forcément, question de ce qu'est devenue la critique d'art. Enfin, l'exemple servait à illustrer la remise en cause et la place allouée à des formes d'art proche du street art, et l'institutionnalisation de formes d'expressions qui n'étaient en aucun cas formatées pour rentrer dans un domaine conceptuellement structuré.
    Il est vrai que j'ai relu ton oeuvre différemment avant et après ton intervention. Heureusement, ou malheureusement.
    Mais sache que tu es un des deux seuls artistes à m'avoir fait réagir dans cette exposition, et que je considère cela, quoi qu'il en soit, comme une grande qualité, étant donné que c'est un des buts premiers de l'art. Je pense que tu ne me contrediras pas sur ce point....

    Cordiale poignée de main.

    RTMT

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